L'interview de la semaine

visibility428 Views person Posted By: Christophe Henry list In: Proposer de l'alimentation en sauvant la biodiversité

« Février sans supermarché »

L’initiative « Février sans supermarché » est un mouvement de plus en plus populaire qui vise à sensibiliser les consommateurs aux conséquences néfastes de la surconsommation et à encourager l'achat local et éthique. Ce mouvement a pris de l'importance au cours des dernières années, alors que les consommateurs s'inquiètent de plus en plus pour l'environnement et les pratiques commerciales des grandes chaînes de supermarchés. En participant à Février sans supermarché, les consommateurs peuvent montrer leur engagement en faveur d'une économie plus durable et plus éthique. En achetant directement auprès de petits producteurs locaux, ils peuvent soutenir des entreprises durables, réduire les distances de transport des produits et minimiser l'impact environnemental.

Faut-il voir dans ce mouvement uniquement des avantages ? Discutons-en avec Xavier:

Amélie Anciaux (=AA) : Salut Xavier, peux-tu nous dire qui tu es en quelques mots ?

Xavier Anciaux (=XA) : Je suis Xavier Anciaux, actuellement coordinateur de la ceinture alimentaire de Charleroi Métropole. Et je suis un des membres fondateurs de la coopérative de la Coof. J’ai également été le premier maraîcher en équipe avec Christophe Henry.

AA ; Selon toi, « Février sans supermarché », est-ce une bonne initiative ou en vois-tu les limites ?

XA : Je dirais que c'est une bonne initiative car elle encourage les gens à adopter des filières de consommation qui sont plus vertueuses que les filières industrielles. C'est donc un bon moyen d'acquérir de bonnes pratiques, même si évidemment, celles-ci ne doivent pas être limitées dans le temps.

Clairement, c'est une bonne initiative car elle nous ramène sur les chemins d'une alimentation plus proche de celle d'avant l'arrivée de l'alimentation industrielle qui, on l’oublie parfois, n'a été introduite que dans les années 70-80. En tant que tel, c'est vrai que c’est confortable d'avoir un endroit unique où on peut tout trouver. C'est ce qu’il y avait, à l’époque, dans les marchés, d'ailleurs, c’est d’ailleurs pour ça qu’on appelle cela des ‘supermarchés’. Donc ce principe de rassembler les choses dans un même endroit pour faciliter la vie des consommateurs, ce n’est évidemment pas problématique. Ce qui est problématique, ce sont les pratiques industrielles.

AA : en quoi les filières industrielles sont-elles problématiques ?

XA : Elles le sont pour plusieurs raisons. D’abord, elles réglementent drastiquement les produits. Pour vendre des produits dans une grande surface, il faut des produits standardisés, comme des courgettes de 18 cm ou des poulets pesant 1kg400. Tout doit être standardisé alors que notre alimentation, justement, doit être faite de diversité. De plus, notre alimentation, et la manière dont on la produit, ont un impact sur la biodiversité et plus largement sur l’environnement. Lorsque l'on produit des épinards en monoculture sur 15 hectares, même s'ils sont certifiés bio, cela n'a rien à voir avec des cultures plus diversifiées, notamment en termes de respect des sols et de la biodiversité. Par exemple, le fait de les arroser en permanence est néfaste pour la biodiversité. Ce sont donc vraiment les pratiques de la grande surface qui posent problème. Pourquoi elles font ça ? Parce que leur objectif n’est pas de nous nourrir mais de faire du profit.

AA : Et acheter des produits locaux en grande surface, c'est une bonne idée ou une mauvaise idée ?

XA : Alors, c'est déjà une meilleure idée que d'acheter des produits qui viennent d'Espagne ou de Hollande, surtout quand on a des produits locaux identiques ou quasi. Mais tant qu’à faire, Il vaut mieux acheter directement en circuit-court parce il y a toujours une marge qui est faite par la grande surface sur les produits du producteur. Et parfois, cette marge oblige les producteurs à vendre en dessous de leurs coûts de production. C’est le cas des fruiticulteurs qui manifestent aujourd’hui à Bruxelles, par exemple, qui expliquent qu’ils vendent parfois le kilo de pommes à 0,5€ et qu’il est revendu aux consommateurs à 2€. Certains producteurs en viennent à arracher leurs pommiers tellement ce n’est plus rentable.

AA : Et comment peut-on comprendre ces difficultés que rencontre le circuit-court ?

XA : Le circuit court est en difficulté puisque la variable d'ajustement, c'est l'alimentation. Une fois qu'on a payé sa maison, ses assurances, sa voiture et tout ce qui est obligatoire, on regarde ce qui reste dans le budget. Et parfois on peut se dire qu’on n’est plus en mesure d’aller à la Coof pour payer un supplément sur son alimentation. Moi, j’ai plusieurs arguments pour lutter contre ce réflexe :

1. D'abord, s'assurer que les prix sont vraiment plus chers à la Coof. Et pour ça, Christophe a fait un exercice et il a bien démontré qu’en bio, on est vachement moins chers.

2. Si on compare par rapport à des produits conventionnels, il faut bien se rendre compte qu’il y a aussi tout l'impact sur notre santé et l'impact sur notre biodiversité qu'un jour on paiera aussi. Donc rien n'est gratuit.

Notre alimentation ne peut pas être bon marché, elle ne peut pas être revue au rabais. Ça doit être payé à sa juste valeur puisque c'est ça qui nourrit nos cellules. On se constitue sur base de notre alimentation. Et donc autant investir en soi-même en achetant une bonne nourriture. Et se sentir en pleine forme, en capacité de penser, d'agir, d'être.

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